Chez Pratt et Whitney

Le stage chez Pratt et Whitney fut des plus instructifs. Le matin avaient lieu des cours en salle tandis que l'après-midi était réservé à des travaux pratiques sur un moteur JT4. Nous devions, sous le contr6le de l'instructeur, démonter et remonter le moteur en suivant les procédures prescrites par le manuel de révision Pratt et Whitney. En fin de stage le moteur était envoyé au banc d'essai ou nous devions relever ses courbes de performances.

Le JT4 équipait les B 707-328A destinés à AF (1). En voici une description succincte : c'était un réacteur classique, à simple flux, d'une poussée de 7620 Kg. Il était constitué de deux attelages mobiles compresseur/turbine comportant des arbres concentriques. L'arbre intérieur liait turbine et compresseur basse pression. l'arbre extérieur liait turbine et compresseur haute pression. La chambre de combustion était formée d'un carter cylindrique contenant des tubes à flamme séparés.

Le régulateur de carburant, fabriqué par Hamilton Standard, était entièrement hydromécanique et utilisait une pression de carburant pour le fonctionnement de ses servomécanismes. Il comportait deux commandes liées mécaniquement aux deux leviers situés au poste pilote. L'un de ces leviers comportait une position Marche et une position Arrêt. Généralement appelé levier de démarrage il permettait l'établissement du débit de carburant ou sa coupure. L'autre levier était la commande de poussée qui agissait sur le débit de carburant et, par suite, sur la poussée. Lors d'une accélération rapide les mécanismes internes du régulateur limitaient le débit à une valeur permettant l'accélération mais sans entrer dans les zones de pompage compresseur ou de surchauffe turbines.

Le paramètre de conduite du réacteur était l'EPR (Engine Pressure Ratio) comme sur tous les réacteurs Pratt etWhitney. Il s'agissait du rapport entre la pression d'entrée compresseur et celle de sortie turbines. Les vitesses N1 et N2, respectivement vitesses de rotation des attelages BP et de HP, étaient des paramètres de contrôle.

Le JT4 était équipé d'un inverseur de poussée. Je crois que beaucoup de lecteurs savent comment fonctionne un inverseur mais, pour ceux qui l'ignoreraient, en voici une explication simplifiée. Il s'agit de l'inverseur du JT4. Sur les réacteurs plus récents les inverseurs sont plus sophistiqués.

On trouve, dans le conduit d'éjection des gaz, deux coquilles (clamshells) montées sur des pivots supérieurs et inférieurs. Lors du fonctionnement du réacteur en poussée normale les coquilles sont appliquées contre la paroi interne du conduit d'éjection et ne jouent aucun rôle. Lorsque l'on passe en inversion de poussée les coquilles pivotent, sous l'action de vérins pneumatiques, et viennent obturer le conduit normal d'éjection tout en découvrant des ouvertures sur les parois latérales de ce conduit. Ces ouvertures comportent des grilles déviatrices qui dirigent les gaz vers l'avant suivant une direction formant un angle d'environ 45° par rapport à l'axe réacteur.

Au poste pilote l'inverseur est commandé par une manette articulée sur la manette de poussée. Orientée vers l'avant elle forme un angle d'environ 90° par rapport à cette manette. Il y a plusieurs dispositifs de sécurité. Tout d'abord la manette d'inversion ne peut pas être manœuvrée tant que la manette de poussée n'est pas en butée ralenti. De plus, une butée, commandée par un contact placé sur le train d'atterrissage, s'oppose à toute action sur la manette d'inversion tant que, à l'atterrissage, le contact avec le sol n'est pas effectif. Lorsque cette condition est réalisée le pilote peut actionner cette manette, mais de quelques degrés seulement. Cette action limitée est cependant suffisante pour commander le changement de position des coquilles. Si ces dernières fonctionnent normalement la manette est libérée et le pilote peut alors continuer à la faire pivoter et augmenter ainsi, par action sur le régulateur de carburant, la poussée en inversion. Dans le cas ou les coquilles n'atteindraient pas leur position d'inversion la manette resterait bloquée, interdisant ainsi toute augmentation de poussée.

(1) A partir de 1962 des 707-328B vinrent compléter la flotte d'Air France. Ces avions étaient équipés de turboréacteurs à double flux P et W JT3-D.